Une semaine déjà s’est écoulée depuis notre arrivée à Arrecife. Que le
temps passe ! Nous avons retrouvé nos camarades de la flottille
MedHermione. Ceux partis de Toulon le 12 octobre ont rejoint le point de
regroupement en décalé après de très courtes escales de repos à mi-parcours. Un
« apéro ponton » pour les premiers arrivés et un repas de cohésion à
mi-séjour furent l’occasion d’échanges sur les conditions de navigation
rencontrées par les uns et les autres.
Les peintures de la marina qui nous accueille ont juste eu le temps de
sécher ; Marina Lanzarote a ouvert ses pontons aux navigateurs le 18
octobre et tous les travaux ne sont pas encore terminés. Conçue selon des plans
dans l’air du temps, elle est bordée d’une multitude de boutiques n’ayant aucun
rapport avec le monde de la mer. En revanche si vous avez oublié vêtements,
chaussures, sous-vêtements, cosmétiques vous aurez matière à compléter votre
trousseau ; des commerces flambants neufs vous attendent. Un petit
supermarché offre essentiellement des alcools, valeur sûre pour les
« apéros ponton ». Les quais sont arpentés le weekend par les
autochtones attirés non pas par les voiliers mais par la concentration
d’enseignes tendance. Pour fêter halloween et retenir le chaland, des
animations, des ateliers « travaux manuels pour les enfants » sont
organisés pendant deux jours sur le quai-promenade. Après trois jours au
mouillage à Graciosa la sauvage et désertique, nous sommes plongés sans
transition dans la civilisation.
C’est hors de la marina que Lanzarote nous dévoile son vrai visage.
Hérissée de 300 cônes volcaniques, son paysage revêt un aspect rude et lunaire
émaillé çà et là de vallées plantées de palmiers qui contrastent avec des
champs de lave noire à l’aspect irréel. La visite de l’île n’a pas fini de nous
étonner.
Lanzarote - Canaries |
Arrecife, environ 54 000 habitants, la capitale de l’île depuis 1852
est une ville sans cachet. Elle compte un nombre limité de lieux dignes
d’intérêts –parmi lesquels deux châteaux- mais a l’avantage d’être une vraie
ville, un lieu de vie et non exclusivement animé à des fins touristiques. En
revanche Teguise, située à 12 km au nord, a des allures de village espagnol ou
de medina nord-africaine. Quelques monuments rappellent que cette agglomération
fut autrefois la capitale de l’île. Le dimanche matin, un immense marché
monopolise ses rues bordées d’étals essentiellement destinés à une clientèle de
touristes. Amateurs d’authenticité, s’abstenir ! Lors de notre passage un
jour de semaine nous avons été frappés par le manque de vie dans les rues de
Teguise. Cependant au détour d’une ruelle, notre attention a été attirée par un
atelier discret. A l’intérieur un luthier nous a ouvert sa porte et laissé
découvrir les différentes phases de fabrication du timple, sorte de ukulélé
d’origine mal connue, probablement introduit dans l’archipel au XV° siècle par
des esclaves berbères. Emblématique du patrimoine canario, ce petit instrument en bois à 5 cordes aux sonorités
aigues est de toutes les fêtes traditionnelles. Le timple berbère était,
semble-t-il, composé d’une carapace de tortue.
Cependant au détour d’une ruelle, notre attention a été attirée par un
atelier discret. A l’intérieur un luthier nous a ouvert sa porte et laissé
découvrir les différentes phases de fabrication du timple, sorte de ukulélé
d’origine mal connue, probablement introduit dans l’archipel au XV° siècle par
des esclaves berbères. Emblématique du patrimoine
Une autre surprise m’attendait plus loin, à Los Valles ; le coiffeur
du village me convia avec insistance à pénétrer dans son salon, un salon d’un
autre âge loin des design modernes. A l’intérieur des photos un peu jaunies,
sur lesquelles figurait mon hôte, tapissaient l’un des murs. Non sans fierté il
me montra les nombreuses coupes gagnées au fil des combats. Mon lutteur me fit
comprendre qu’il était sourd et muet. Etaient-ce les conséquences de la
pratique de ce sport ? Je ne
saurais le dire. Affiche à l’appui il m’invita à assister au prochain match
organisé, disputé 15 jours plus tard.
La lucha canaria –lutte canarienne- remonterait aux Guanches, un peuple de
robustes guerriers très portés sur les épreuves de force, qu’il s’agisse de
sauter par-dessus les précipices, de plonger depuis de vertigineux promontoires
ou de combattre corps à corps. Un membre de chaque équipe se place en face de
son adversaire sur le terrain et, passé le salut protocolaire et quelques
autres manifestations de bonne volonté, chacun tente de faire mordre la
poussière à l'autre. Aucune partie du corps à l’exception de la plante des
pieds ne doit toucher le sol et le premier à manquer à cette règle perd la
partie. Les facteurs essentiels ne sont pas la taille et le poids des lutteurs
–quoique que ces lutteurs soient aussi charpentés que des piliers de rugby-
mais plutôt le talent des combattants à saisir leur adversaire et à le forcer à
prendre la position dans laquelle il pourra facilement être renversé.
Haria |
En remontant vers le nord-ouest, Haria,
village installé au milieu d’une vallée plantée de palmiers et ponctuée de
bougainvillées et de poinsettias aux
couleurs éclatantes, rompt la monotonie des paysages volcaniques. Aux XVII° et
XVIII° siècles, les habitants plantaient traditionnellement un palmier pour
célébrer la naissance d’un enfant -plus exactement 2 pour un garçon et 1 pour
une fille-. Plus tard, cette oasis de style nord-africain devint une
destination thermale fréquentée par des Canariens fortunés.
Au mirador del Rio un
superbe panorama plongeant sur l’île de Graciosa captive le promeneur,
spectacle grandiose au pouvoir envoûtant. Une autre curiosité de Lanzarote est
la cueva de los Verdes. Un gouffre
béant de 1 km de long est la partie la plus spectaculaire d’un tunnel de lave
de plus de 8 km, généré par une éruption volcanique 5000 ans auparavant. En
creusant un sillon vers la mer –plus de 6 km de galeries se trouvent désormais
au-dessus du niveau de la mer et 1,5 km sous l’eau-, les couches supérieures se
refroidirent et formèrent une croûte sous laquelle le magna en fusion continua
à couler jusqu’à la fin de l’éruption.
Ile de Graciosa |
Piscine naturelle vert émeraude |
La découverte de Lanzarote ne saurait être complète sans un petit tour du
côté de la route des vins. Plantée de bien curieux vignobles, elle serpente à
travers à travers la région du sud-ouest. Le sol de lave noire enrichi par les
séismes successifs, convient parfaitement à la vigne cultivée dans de petits
creux, derrière des murets en demi-lune appelés zocos. L’île s’enorgueillit de
cultiver un cépage disparu des vignobles en Europe suite à l’épidémie de
filoxera : le malvoisie.
Vignes en zocos |
Nous n’aurons pas le temps cette fois de découvrir d’autres îles
canariennes ; nous sommes attendus au Cap Vert situé à quelques 880
nautiques pour embarquer mon oncle.
Un dernier approvisionnement en vivres frais et nous appareillons avec Alain qui vient compléter l’équipage de Philéas.
Trajet Canaries vers Cap Vert |
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