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jeudi 26 mars 2015

CAP SUR PORTO RICO

Vingt-cinq nautiques nous séparent de la côte sud de Porto Rico. A 07h00 nous appareillons en direction de Fajardo, petite agglomération sans charme mais géographiquement bien située pour nos incursions touristiques. Ici aussi moult hauts-fonds tapissent le plan d’eau mais la rigueur américaine soutient le navigateur ; des bouées nous guident dans ce dédale de pièges. Nous mouillons devant la marina implantée sur un îlot en face de la ville. Un service de transrade assure les liaisons avec le continent. La marina très sécurisée ne regorge pas d’activités,  presqu’une marina fantôme, avec un gardien malgré tout. Des portes avec système de carte d’accès interdisent, aux non-résidents, l’intrusion dans le reste de l’ile.

De l’autre côté de la rade, à Fajardo, l’activité est toute relative. De tristes maisons aux formes rectangulaires, aux couleurs défraîchies s’alignent dans des rues sans âme. Partout des barreaux aux fenêtres et grillages surmontés de barbelés tentent de sécuriser biens et personnes. J’ai l’impression de retrouver l’atmosphère d’insécurité d’Afrique du Sud mais ici au milieu de constructions délabrées.

Avec nos amis de P’tit Mousse nous louons un véhicule ; entreprise bien difficile. L’unique agence de location dispose d’un parc automobile restreint. Une réservation bien en amont eût été plus que souhaitable. A force d’insistance notre loueur nous « dégote » un véhicule DODGE de neuf places qui a déjà bien vécu : 200 000 km au compteur tout de même ! Les amortisseurs, arrière surtout, ont souffert et ne rendent plus guère leur office.  Le dos des passagers installés à l’arrière réclame en vain un peu plus de tendresse et de ménagement. Un inquiétant voyant orange s’affiche sur le tableau de bord. Nous ne renoncons pas pour autant à notre objectif : fouler la réputée forêt tropicale montagneuse El Yunke.

A l'arrière plan forêt tropicale El Yunke
Selon la légende indienne l’esprit bienfaisant « Yuguiyu » vivait et régnait au sommet du pic le plus élevé et protègeait Porto Rico et ses habitants. Cette croyance des Tainos explique sans doute qu’une randonnée à travers la forêt tropicale jusqu’à ce pic, qui culmine à 1065 mètres, procure un sentiment de bien-être et de sastifaction personnelle, même si la marche est rude. Cette montagne intégrée à la chaîne de Luquillo a donné son nom à la réserve forestière environnante, aussi surnommée avec fierté la « Caribbean National Forest »(1). Les autorités et guides touristiques la présentent comme l’unique fôret tropicale du réseau des parcs nationaux des Etats-Unis.

La réserve d’une superficie de 11 200 hectares abrite plus de 400 espèces d’arbres et de fougères. La plupart pousse avec frénésie dès que les nuages chargés de pluie poussés par les vents de l’Atlantique déversent leurs eaux sur la chaîne de Luquillo, créant des conditions de serre. La zone est sillonnée par 13 sentiers bien entretenus, de la petite promenade le long d’un chemin asphalté, à la grande randonnée jusqu’au somment d’El Yunque. Les jours de bonne visibilité les îles Vierges se détachent sur l’horizon.



Nous nous laissons tenter par une petite marche aux chutes de la Mina. A peine pénétrons nous dans la forêt que le coassement de la grenouille arboricole coqui (emblème national de Porto Rico) nous accueille. Son camouflage la rend invisible dans les feuillages, il nous est impossible de l’apercevoir. Ici et là des orchidées miniatures tranchent avec la végétation luxuriante d’un vert bien soutenu, des escargots à coquille couleur terre colonisent le tronc des arbres, des oiseaux se faufilent dans ce dédale de verdure. Mais le perroquet de Porto Rico, espèce rare, sans doute incommodé par les randonneurs par trop bruyants ne nous montre ni le bout de son bec ni son beau plumage vert.




Une quarantaine de minutes plus tard nous atteignons la chute d’eau de la Mina, visitée par de nombreux marcheurs. Cette affluence humaine n’est point à notre goût, nous les sauvageons de la mer déshabitués des mouvements de foule, nous rebroussons chemin.




San Juan, la capitale située à moins d’une heure de route est notre destination suivante. La route reliant Fajardo à la capitale est bordée d’habitations aux formes cubiques ou rectangulaires aux toits plats et aux façades décolorées par le temps. Elles s’alignent militairement le long de la chaussée. L’esthétique est visiblement une notion inconnue de cette partie de Porto Rico. A l’approche de San Juan des centres commerciaux à l’américaine fleurissent et les chaines de restauration rapide se concurrencent les unes avec les autres (Burger King, KFC, Mac’Donald, Subway etc…).

Métropole moderne, la capitale de Porto Rico possède une riche histoire. Elle est le lieu d'attraction principal de l'île, en particulier la vieille ville construite par les Espagnols. Elle possède de nombreux bâtiments historiques (forts, églises, etc.) et quelques musées. Son centre historique renommé pour son architecture coloniale contraste avec son front de mer bordé de gratte-ciel. Le vieux San Juan est incroyablement bien conservé pour un quartier qui remonte à près de 5 siècles.   Fondée en 1521,  elle est la ville la plus ancienne d’Amérique après Cuzco au Pérou. Aujourd’hui
Hiboux sur les balcons 
San Juan connaît une importante activité commerciale, elle joue un rôle moteur dans l’économie et dans la vie politique de l’île et constitue la tête de pont culturelle de l’influence américaine aux Caraïbes.

Nous arpentons les rues du vieux San Juan le nez pointé en l’air à la découverte des façades travaillées, de style hispanique, toutes dotées de balcons généreux. De nombreuses galeries d’art et des musées attisent la curiosité du chaland tandis que les restaurants en appellent à leurs papilles….

Les villes du Nouveau Monde érigées par les colons espagnols reproduisent tout naturellement le modèle hispanique de rues gravitant autour d’une place centrale qui demeure aujourd’hui encore le cœur de la ville. Autour de la place San José, la plus ancienne de San Juan, gravite l’église du même nom elle aussi la plus ancienne du Nouveau Monde construite dans les années 1520 et parfaitement restaurée. Juste à côté le couvent dominicain abrite désormais une galerie nationale consacrée à la culture portoricaine du 18ème siècle aux années 1960.  Place d’Armes, l’hôtel de ville, réplique de la mairie de Madrid, se dresse fièrement en face de la fontaine centrale. La cathédrale quant à elle est un rare exemple d’architecture gothique construite au Nouveau Monde.

Le couvent

La liste des places et centres d’intérêts est loin d’être exhaustive mais la visite de San Juan ne saurait être complète sans un passage à la Plaza Colon, dédiée initialement  à St Jacques mais rebaptisée en  1893 à l’occasion du 400ème anniversaire de la découverte de Porto Rico pour honorer Christophe Colomb.



Eglise San José
En périphérie du centre historique l’avenue de la Constitution, principale artère de San Juan est un alignement rigoureux d’édifices impeccablement ravalés. Ils abritent pour la plupart des administrations d’Etat ou des établissements publiques.

La fin de notre journée tourisme coïncide avec les heures de pointe. La périphérie de San Juan n’est pas épargnée par les embouteillages, lot quotidien des grandes métropoles. A n’emprunter que les routes maritimes depuis six mois nous en avions oublié, sans nostalgie aucune, les aléas de la vie civilisée…

Après une bonne nuit de repos nous appareillons de Fajardo à l’aurore pour rejoindre l’île de Vieques distante d’une trentaine(1) de nautiques.

Vers 15h00 nous pénétrons dans la baie de Puerto Real située sur la côte sud en face du village Esperanza. Comme à chaque arrivée nous effectuons un tour d’horizon à la recherche d’un guidon MédHermione. Nous localisons l’OVNI 395, « AlexMarie » de Luc et Delphine et passons  les saluer avant d’établir notre mouillage. Nous nous écartons des bouées privées et jetons l’ancre à proximité de nos amis.

Petite île étroite de 34 km de long, Vieques est bordée de plages aux noms colorés, plage bleue, rouge, verte, noms donnés par les anciens propriétaires de Vieques qui l’occupèrent pendant plus de soixante ans : l’armée américaine. Les deux tiers de l’île servirent de camp d’entraînement au tir d’artillerie et d’essais de missiles. La population déplacée sur le tiers restant organisa des pétitions. Des manifestations pour sensibiliser l’opinion internationale sur les dangers de telles opérations, pour les habitants et pour l’environnement, se répétèrent inlassablement. De nombreuses arrestations s’en suivirent malgré le soutien général des autochtones, des forces politiques locales et d’artistes de renom. Finalement en 2003 le contrat de réquisition ne fut pas renouvelé et le 1er mai George W. Bush annonça le retrait de l’armée. 
Depuis cette date cette partie de l’île devenue havre de paix pour la faune et la flore est convoitée par les investisseurs immobiliers et le prix des terrains s’est envolé. La richesse des fonds sous-marins en fait un lieu réputé pour la plongée.

La mer bordant Porto Rico est connue pour sa richesse en planctons. Des micro-organismes biolumunescents sont observables à la nuit tombée. Ils sont particulièrement denses à Vieques dans Mosquitoes bay, baie jouxtant notre lieu de mouillage. Un formidable festival de lumières attire touristes et navigateurs qui ont réussi à franchir, dans des conditions souvent houleuses,  la petite passe de 6 mètres de large. Le moyen le plus sûr et, le plus sage, pour y accéder consiste à mouiller à l’entrée de l‘étroit passage et de se rendre sur le site du spectacle en annexe.

En mer, les quarts de nuits sont l’occasion d’assister à des feux d’artifice marins captivants, de multiples lumières blanches jaillisent de chaque bord de Philéas lorsque l’étrave fouette la houle. A la poupe l’hydro-générateur réveille les planctons qui illuminent le sillage de mille feux.

A terre le petit village d’Esperanza est bordé de restaurants, signe d’activité touristique et par une belle promenade en bord d’océan. Isabel Segunda, côte nord, ville principale de Vieques est organisée autour d’une spacieuse place centrale sur laquelle le Fort Conde de Mirasol, dernière structure militaire espagnole subsiste.

A Vieques la carène de Philéas fait peau neuve. Equipés de palmes, masque, tuba, ventouse, grattoir et brosse nous débarrassons Philéas des algues vertes et autres colonisateurs indésirables, sur et sous la coque. Son dernier passage entre les mains du barbier Christian, expert en la matière il va sans dire,  remonte à deux mois, aux Saintes.  Pendant deux bonnes heures Alain astique le bouchain tribord, je concentre mes efforts sur le côté bâbord tandis que Christian chatouille avec énergie et détermination le ventre et les quilles de Philéas. La jonction ligne de flottaison-carène fait de la résistance mais nous sommes tenaces. Lors des remous provoqués par les annexes et bateaux à moteur fendant la mer à des vitesses décoiffantes, nous buvons quelques tasses salées en les maudissant. Un peu avant la pause déjeuner nous reposons nos armes, Alain émerge de l’eau des algues vertes agrippées à sa barbe naissante. Delphine du voilier AlexMarie nous propose une boisson roborative et s’exclame en voyant Alain : « Ah la belle barbe en herbe ! ».

Nous sommes désormais près pour en découdre avec la mer et gratter, au sens figuré cette fois, un nœud sur notre vitesse de croisière. Nous quittons Vieques à la première lueur du jour pour rejoindre la côte Est de Porto Rico, distante d’une quarantaine de nautiques(1). Le skipper en général matinal et l’armateur, d’ordinaire beaucoup moins, se chargent de l’appareillage tandis qu’Alain profite de quelques heures de sommeil supplémentaires jusqu’à son quart. Son réveil est salué par la visite de plusieurs bans de dauphins. A la grande déception d’Alain ils ne sont pas passés par la boulangerie, les croissants seront pour un autre jour ! Les odontocètes nous font l’honneur d’un show de natation synchronisée pendant une bonne heure. Ils jouent avec l’étrave de Philéas, s’éffleurent les uns les autres, se font des queues de … dauphins, effectuent des quarts de tours et se laissent glisser sur le flanc tout en nous jetant un coup d’œil espiègle comme pour s’assurer de notre présence. Un petit rigolo s’amuse à faire la planche coulée et nous dévoile la blancheur de son ventre à moult reprises. Oh ! Tiens celui-là tout en nageant satisfait un besoin naturel juste devant le nez de son frère qui lui rend la pareille. Et pour finir nous avons droit à une inspection de coque par cette patrouille sous-marine hors du commun. Nous rencontrons cette variété de dauphins à long rostre au bout blanc, le steno bredanensis pour la première fois. Le steno -aucun rapport avec la sténo…dactylographe du siècle dernier- a une tête allongée caractéristique. Son statut n’est pas bien connu. Il est également appelé steno rostré. Comme tous les cétacés à dents il a un crâne asymétrique et un seul évent. 

Depuis quelques jours Eole ne souffle pas avec frénésie, notre moyenne n’est pas digne d’apparaître dans le Guinness des records. Mais après tout, nous sommes en croisière et décidons d’une escale devant la plage de Patillas située à une heure de route de Ponce mais à 8 heures de navigation par petit temps... Niché entre la mer et les montagnes tapissées de forêts, Patillas est un modeste village balnéaire. Ici encore l’approche nécessite vigilance et attention pour éviter un haut-fond. A 13h30 le soleil est suffisamment haut pour nous permettre de le localiser sur notre tribord. Droit devant nous reconnaissons l’unique voilier mouillé, appartenant à un couple de lyonnais en congé sabbatique d’une année. Ils ont acheté leur monocoque aux Antilles et entendent le revendre en novembre pour reprendre un mode de vie plus conventionnel comme le firent les précédents propriétaires. L’heure de la retraite n’a pas encore sonné pour eux !

Le lendemain nos atteignons le Ponce Yacht and Fishing club accueillant essentiellement de unités dotés de (très) gros moteurs destinées à la pêche. Ce club privé situé à 8 km de Ponce rassemble les passionnés de pêche sportive. L’accès par voie terrestre est filtré par un garde, un passe délivré par les bureaux du club, déjà fermés à notre arrivée et pour tout le weekend, est indispensable pour circuler sur le site. Le factionnaire applique le règlement à l’américaine ; en l’absence de carte de passager temporaire, que notre voilier soit au mouillage devant le club ou non si nous sortons nous ne serons pas autorisés à rentrer. Il nous interroge encore : « Etes-vous passés par les services de l’immigration ? Rassuré il nous invite à amarrer notre annexe à l’extérieur du club si nous souhaitons nous rendre en ville et rejoindre notre voilier par la mer.

Ponce n’est pas une destination touristique très prisée. Elle n’a cependant pas perdu le charme architectural des siècles prospères où la production de café et de canne à sucre en faisait une cité riche. Ponce fut fondée en 1692 par Juan Ponce de Léon y Loayza, le petit-fils du conquistador espagnol Juan Ponce de Léon. De cette époque est né son surnom « La cité des Lions ». D’abord hameau puis village Ponce acquiert le statut de ville à part entière en 1877 grâce à sa croissance basée sur ses productions agricoles variées (canne, maïs, café) et au commerce du rhum. Les distilleries de rhum ont fait la fortune des grandes familles ponceñas du XIXème jusqu’au milieu du XXème siècle. A la fin du XIXème siècle Ponce était plus peuplée que San Juan. La seconde guerre mondiale sonne le déclin de l’économie. Seule la distillerie Seralles subsiste et commercialise le DON Q. Aujourd’hui la plupart de la production de canne provient d’Haïti et de République Dominicaine.

Notre taxi nous dépose au cœur du centre historique de la ville, Plaza Las Delicias juste devant le fameux Parque de Bombas -la caserne des Pompiers- devenue musée. D’imposants lions très colorés plantés en sentinelles de chaque côté du bâtiment apportent une note des plus insolites, un peu kitch. C’est en 1882 que le gouvernement espagnol décide de la construction d’une caserne de pompiers. Le lieutenant-colonel Maximo Meana, architecte, établit les plans et fait réaliser un bâtiment essentiellement en bois à l’allure d’un château baroque espagnol. Une brigade de pompiers s’y installe. L’année suivante, en 1883, un important incendie ravage la partie sud de l’île, notamment les champs de canne. Les pompiers mettent 22 jours pour circonscrire le feu. En 1885 la caserne devient une référence pour toute la partie sud de Porto Rico. Meana devient maire de la ville et fait alors repeindre le bâtiment aux couleurs municipales, rouge et noir. La caserne restera en fonction jusqu’en 1990, date à laquelle elle est transformée en musée.

Cathédrale Nuestra Senora de Guadalupe



Derrière la caserne se dresse la cathédrale Notre Dame de Guadalupe, principal édifice religieux de Ponce construit entre 1835 et 1839 sur les cendres de la chapelle la Nuestra Señora de Guadalupe érigée lors de la fondation de Ponce, en 1692. Depuis 1984 la cathédrale est classée au registre national des monuments historiques.





L'hôtel de ville


Près d’un demi-milliard de dollars a été consacré à la préservation du centre colonial de la 2ème ville de Porto Rico. Le cœur de Ponce datant de la fin du XVIIIème siècle a été déclaré « Trésor National ». Il abrite plusieurs places, églises, des bâtisses coloniales richement décorées, quelques fontaines. La spécificité de Ponce tient à ses angles de rues chanfreinés qui facilitaient le passage des chariots transportant des maisons en bois d’un site à l’autre. 

Lundi 23 mars midi les formalités de sortie de Porto Rico accomplies, l’approvisionnement en eau effectué, nous appareillons pour l’île à Vache. 430 nautiques nous séparent d’Haïti. Un vent d’est souffle timidement, de petits moutons pas très agressifs tapissent la surface de la mer. Nous sortons la garde-robe légère de Philéas ; le spi reprend du service. Philéas progresse à une petite vitesse moyenne de quatre nœuds(3). A ce rythme nous toucherons notre destination dans quatre jours.

Nous entamons notre seconde nuit de navigation, l’obscurité est déjà bien établie lorsque Christian alerté par une série de sifflements devine du mouvement à la proue de Philéas. Des masses sombres, à peine visibles à la lueur des étoiles, jouent à cache-cache avec nos yeux. Ce sont des dauphins venus batifoler avec notre étrave ; un cadeau de la nature pour égayer notre début de nuit en mer. Ondulations, petits sauts et coups de queue réveillent les micro-organismes bioluminescents. Le plan d’eau s’illumine de-ci de-là. Notre vision maintenant adaptée à l’obscurité suit l’évolution de nos visiteurs et se concentre sur le sillage luminescent provoqué par l’onde de choc. Une fois encore les grands enfants que nous sommes, restent en extase devant ce spectacle… lumière pour une fois. L’intensité des rais lumineux confirme un ban conséquent. Les formes observées révèlent des cétacés de petite taille.

A une heure plus avancée de mon quart un oiseau, sans doute fatigué de vagabonder sur la mer des Caraïbes aspire à un peu de repos et tente un atterrissage sur Philéas. Immobile dans la pénombre du cockpit je suis son évolution avec intérêt. Après trois tentatives vaines il se pose non sans difficultés sur le panneau solaire, plate-forme en mouvement ! Par mer d’huile l’opération eut sans aucun doute été plus aisée. Ce terrain mouvant ne lui sied guère, il reprend son envol. S’agit-il d’un puffin ? Peut-être ! Je n’ai point l’œil suffisamment affûté pour l’identifier avec certitude à la seule lueur du clair de lune. 

Les journées s’enchaînent, le vent ne s’affole toujours pas voire même faiblit par période. La mer quant à elle monte en puissance ; des lames et des crêtes d’écume déferlent et ballotent Philéas qui part au lof. Le troisième jour Eole sort enfin de sa torpeur, Philéas allonge la foulée. L’immense plan d’eau jusqu’ici désert commence à se peupler. Nous captons sur les fréquences VHF(4), Aldébaran et Eraünsia, deux voiliers de notre flottille et restons en contacts radio ponctuels. AlexMarie, parti en même temps que nous de Ponce, s’est fait la belle. Son signal AIS a disparu de nos écrans depuis longtemps déjà. Tous trois nous adoptons le même modus operandi : réduire la voilure pour éviter une arrivée de nuit à l’Ile à Vache.

Au terme de quatre nuits de navigation et de trois jours et demi de mer nous rejoignons le reste de la flottille au mouillage baie Feret, juste en face de l’hôtel Morgan. 








(1)    Caribbean National Forest : Forêt nationale tropicale.
(2)    Un nautique équivaut à 1852 mètres. 30 nautiques correspond à un peu plus de 55 km et 40 nm à 74 km.
(3)   4 nœuds : 7,4 km/h
(4)  VHF : Very High Frequenzy

(5)    AIS : Automatic Identification System – système d’identification automatique.

1 commentaire:

  1. Bonjour Brigitte. J'en déduis que la réparation du guindeau a eté bien réalisée. Alors bonne continuation à vous.
    Gros bisous
    Lili

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