Dimanche 30 octobre 2011 au petit matin, la marée est haute, les aussières larguées, nous quittons El Puerto de Santa maria, cap au 272. Le chenal d’accès est calme, rien à voir avec les forts courants rencontrés lors de notre arrivée qui nous ont donné du fil à retordre !
Le vent est faible cette première journée de transit, Philéas se traîne. En soirée changement de programme, le vent forcit (force 6). Les jours suivants nous naviguons sous des vents instables qui nous contraignent à régler les voiles en permanence : tantôt nous envoyons, tantôt nous réduisons la superficie de la toile portante. Le coup de vent annoncé par les fichiers GRIB et par météo France nous rattrape, force 7 puis 8 sur l’échelle de Beaufort mais bien sûr soufflant dans la mauvaise direction par rapport à la route que nous devons suivre. Pas question de faire une route directe pour rejoindre les îles Canaries. Nous louvoyons, tirons des bords carrés. Cela n’en finit pas. L’accalmie prévue pour le jeudi n’est pas au rendez-vous. Le vent aurait dû adonner mais non, rien. Le vendredi, nouvelle dépression. La mer se déchaîne, se creuse davantage, des vagues de 4 à 5 mètres déferlent sur Philéas. La mer est désordonnée, la houle croisée nous ballote sans pitié. Les grains s’enchaînent pas moyen de les éviter. Philéas est soulevé par les déferlantes et tape violemment en redescendant au contact de l’eau. Le pilote automatique a décroché et capitulé depuis longtemps. Le régulateur d’allure a pris le relais et barre au mieux. La résistance opposée par la forte houle désordonnée a finalement raison du régulateur : bout sectionné par l’importante tension et poulie cassée. Le dernier recours est de barrer manuellement. Gouverner dans ces conditions est éprouvant. Très vite nous décidons de nous mettre à la cape. Nous réduisons au maximum la voilure : 3 ris dans la grand-voile et tourmentin hissé. Philéas dérive sans opposer de résistance, il fait le dos rond en attendant la fin du coup de vent. Nous continuons la veille, le danger étant une collision avec un cargo. Pas facile à repérer derrière cette houle ! Nous consultons les bulletins météo avec avidité. Les conditions ne s’arrangent toujours pas : vent force 8, mer très forte à grosse. Les déferlantes sont impressionnantes de par leur hauteur. Nous nous laissons dériver pendant 24 heures. Il est inutile de lutter. Le combat serait inégal. Mieux vaut faire le roseau plutôt que le chêne. Philéas n’est plus manœuvrant. La mer apprend l’humilité. On ne triche pas avec la mer, le marin le sait.
Samedi 5 novembre, le vent mollit un peu, vent force 6. La hauteur des vagues diminue mais reste significative. Nous nous remettons en route. Philéas présente sa hanche aux lames et file 7 à 8 noeuds en route directe cette fois, enfin !!!
Le bilan des dégâts n’est pas dramatique si nous considérons les « coups de tabac » que nous avons essuyés. Le régulateur d’allure est à réparer, la grand-voile déchirée a fait l’objet d‘une réparation de fortune en mer, l’hydro générateur a pu être réparé en mer également mais le système de fixation est à revoir à quai.
Côté humain, tout va bien : pas d’excès alimentaire, nous arriverons sveltes ...mais peut-être pas élégants aux Canaries !!!! . Il est vrai qu’il est difficile de cuisiner dans un shaker, les casseroles dansent et les contenus ont tendance à s’échapper !!!! Il est d’ailleurs préférable d’opter pour un aliment solide plutôt que liquide. Boire est une action enfantine en temps normal. Cela devient très vite du sport lorsque la houle a décidé d’y « mettre son grain de sel » ! Avez vous déjà essayé de boire dans un bol ou dans un verre lorsque vous êtes sur la grande route à OK Coral ? Et bien cela est à peu près la même chose. Il faut repérer le bon moment : en haut de la vague le liquide monte et se renverse, en bas de la vague il s’échappe et s’éloigne de la bouche !!!! Il faut s’empresser d’aspirer le liquide lorsqu’il est à portée de bouche…
Les conditions météo, nous ont très vite dissuadés de faire escale à Madère, l’une des zones à éviter. L’escale envisagée à Ténériffe également avortée car nous avons quelques réparations à effectuer avant la grande traversée en direction des Antilles.
Samedi 5 novembre, 23h30, fin de mon quart. Depuis ce matin nous filons à bonne allure et la mer s’est assagie quelque peu. Le ciel n’est pas encore dégagé mais la lune et les étoiles sont visibles. Pourvu que cela dure !
La journée du dimanche est une journée agréable. Nous avons toujours de la houle mais elle s’est nettement atténuée et nous glissons à bonne allure sur l’eau en direction de La PALMA, île la plus au nord-ouest des Canaries. Si le vent ne faiblit pas nous devrions l’atteindre lundi en fin de matinée.
Lundi 7 novembre, Philéas tout guilleret accoste à Santa Cruz de La Palma après 1750 nautiques parcourus depuis notre appareillage de Toulon. L’équipage va profiter d’une escale de quelques jours bien méritée avant la grande traversée de 2700 nautiques qui nous conduira aux Antilles.
A la Salinas de Fuentecalente |
De forme triangulaire pointant vers le sud, l'île est montagneuse et composée de trois volcans : au nord la caldeira de Taburiente qui forme un cirque de neuf kilomètres de diamètre ouvert vers le sud-ouest, au sud le Cumbre Vieja, une crête allongée couverte de cônes volcaniques, et entre les deux le Cumbre Nueva. Le point culminant de l'île est le Roque de los Muchachos, un sommet de la caldeira de Taburiente culminant à 2 426 mètres d'altitude. Ses reliefs escarpés et la pluviométrie ont permis la formation et le maintien d'une forêt faisant de La Palma, l'île la plus boisée des îles Canaries. L'île jouit d'un climat doux avec des températures moyennes de 15 °C en hiver et de 28 °C en été. La pluviométrie est concentrée à l'automne et en hiver. Mais par chance le soleil est présent pendant une grande partie la durée de notre séjour (sauf la journée de notre excursion autour de l’île… !)
Le navigateur découvre La Palma avec fascination. Le regard a du mal à se dégager de cette île dont les montagnes retiennent les nuages qui semblent être dessinés à mi-hauteur des crêtes. Quelle belle récompense que ce spectacle envoûtant après une navigation difficile ! Promesse d’une escale agréable !
Arrivée à la Palma |
La promesse est tenue. L’accueil à la marina et en ville est chaleureux et convivial. La ville de caractère témoigne d’un passé florissant. Au XVIème siècle, Santa Cruz fut le 3ème port de l’empire espagnol après Séville et Ambères. Ce passé tout en splendeurs a laissé dans la vieille ville un héritage important de palais, de bâtiments de type colonial et de maisons à l’architecture traditionnelle canarienne, comme par exemple les balcons en bois. Tout séduit le promeneur qui se ballade le nez en l’air pour observer les façades. Les rues, piétonnes sont pavées avec des pierres volcaniques. Ne cherchez pas de grands magasins ou centres commerciaux, seules des petites boutiques et petites échoppes fleurissent à Santa Cruz mais il est possible de trouver de tout. Le marché couvert, ouvert jusqu’à 14h propose fruits (bananes du pays, papayes, mangues…), légumes, viandes et poissons en partie surgelés. Il me rappelle le marché de Papeete mais en miniature.
La Plaza de Espana concentre à elle seule plusieurs des édifices les plus importants de l’île. On y trouve la mairie construite au XVIe siècle pendant le règne de Felipe II. La façade est dominée par une image en relief du monarque et par les armoiries de la dynastie autrichienne.
La Plaza de Espana concentre à elle seule plusieurs des édifices les plus importants de l’île. On y trouve la mairie construite au XVIe siècle pendant le règne de Felipe II. La façade est dominée par une image en relief du monarque et par les armoiries de la dynastie autrichienne.
Santa Cruz de La Palma |
SANTA CRUZ DE LA PALMA
La Palma est également une réserve de la biosphère. Elle est décrite comme l’île verte ou l’île Bonita où se diffuse une multitude de couleurs sous l’un des meilleurs ciels de la planète pour l’observation astronomique. On y trouve les observatoires d’astrophysiques les plus importants de l’hémisphère nord. Le randonneur est impressionné par les ravins profonds, par les volcans et leurs étranges paysages de lave. Il peut se pencher sur l’un des plus grands cratères du monde classé parc national où poussent sur les flancs de ses pentes vertigineuses de splendides exemplaires de pins canariens, une espèce végétale présente seulement aux îles Canaries. La Palma est considérée comme une des îles les plus belles des Canaries. C’est une destination où j’aurais plaisir à revenir mais en y consacrant beaucoup plus de temps.
Notre escale touche à sa fin. Elle fut riche en découvertes et en manifestations. La Palma fut une étape de regroupement où les 10 voiliers participant au rallye se retrouvèrent pour d’agréables moments conviviaux.
Côté touristique, l’incontournable tour de l’île nous a permis une approche terrestre de LA PALMA. Notre guide nous a fait découvrir la diversité de la végétation de l’île : au nord une végétation luxuriante et au sud l’empreinte des volcans avec des paysages désolés. Les volcans ne sont plus actifs sur cette île depuis 1971 mais les coulées de lave laissent des traces durables. En revanche à El Hierro, île voisine des Canaries, une activité volcanique est enregistrée depuis quelques jours. Plus au sud, rapide petit arrêt aux marais salins avant de poursuivre notre route pour une visite d’une bodega (cave vinicole) puis au musée du tabac.
Côté culturel, nous avons le plaisir d’assister à une soirée «vin rouge, châtaignes», l’équivalent de notre traditionnelle soirée beaujolais nouveau, animée par un orchestre local dont le répertoire semble emprunté aux musiques cubaines : La réplique de Bueno Vista !
La fin de l’escale approche, il faut penser à l’avitaillement, notamment en produits frais. Rendez- vous est pris avec notre sympathique guide qui nous a proposé de nous emmener au marché paysan de MAZO, commune située dans les hauteurs à une dizaine de kilomètres de Santa Cruz. Ce marché a lieu tous les samedis et dimanches. Tous les produits sont issus de la production locale et les prix sont réglementés par la commune. Nous faisons le plein de mangues, ananas, bananes, et fruits dont j’ai oublié le nom et qui ne sont cultivés qu’à La PALMA. Les légumes y sont également abondants et de très bonne qualité. Autant dire que de retour à bord, mes deux co-équipiers m’accueillent avec des yeux écarquillés et pétillants de plaisir et bien sûr avec le sourire.
La fin de l’escale approche, il faut penser à l’avitaillement, notamment en produits frais. Rendez- vous est pris avec notre sympathique guide qui nous a proposé de nous emmener au marché paysan de MAZO, commune située dans les hauteurs à une dizaine de kilomètres de Santa Cruz. Ce marché a lieu tous les samedis et dimanches. Tous les produits sont issus de la production locale et les prix sont réglementés par la commune. Nous faisons le plein de mangues, ananas, bananes, et fruits dont j’ai oublié le nom et qui ne sont cultivés qu’à La PALMA. Les légumes y sont également abondants et de très bonne qualité. Autant dire que de retour à bord, mes deux co-équipiers m’accueillent avec des yeux écarquillés et pétillants de plaisir et bien sûr avec le sourire.
Lundi matin, PHILEAS s’impatiente, il est temps de partir vers d’autres horizons. Cap est mis au 206° direction le Cap Vert, plus exactement vers Mindelo sur l’île de Sao Vicente, que nous atteindrons dans une bonne semaine si les vents sont généreux (mais pas trop tout de même… !) après avoir parcouru 700 miles.
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