26 janvier 2012 - Carriacou, « l’île entourée de
récifs »
Carriacou
contrairement aux autres îles des Grenadines visitées précédemment dépend de
Grenade. Les premiers habitants furent les indiens Arawaks puis Caraïbes qui ont nommé Carriacou « le pays des
récifs ». Carriacou fut colonisée par les français mais cédée en 1763 avec
Grenade au Royaume-Uni avec le traité de Paris. On y retrouve une influence
française dans les noms de villages et dans le patois créole local.
Le
point d’entrée pour les formalités s’effectue à Hillsborough. Nous y mouillons
une nuit et assistons aux répétitions des représentations organisées à
l’occasion de la fête nationale. Le 7 février, les îliens fêteront le 38ème
anniversaire de leur indépendance. Patriotes et très fiers d’appartenir à
Grenade, les habitants pavoisent leur maison aux couleurs nationales. Il en est
de même des commerces et bien sûr des édifices publics. Le long des routes et
des rues tout ce qui peut revêtir les couleurs de l’indépendance l’est. Nous
sommes gentiment conviés à assister aux répétitions.
Carriacou isolée à
près de 20 milles nautiques (37 km) au nord de Grenade a conservé une certaine
autonomie et des traditions culturelles et surtout spirituelles bien
spécifiques.
Hillsborough
, la capitale de l’île, nichée en bordure de la côte ouest ne compte que
quelques rues bordées de cases ou de vieilles bâtisses dont certaines datent du
XVIIIème siècle. En périphérie du bourg nous sommes frappés de voir un grand
nombre de magnifiques maisons apparemment très récentes. De grands escaliers
extérieurs en forme de Y renversé bordés de colonnes amènent à l’entrée. Nous
nous étonnons de tant de richesse. Les véhicules rencontrés, tous des 4X4
flambants neufs et des minibus très récents ajoutent à notre surprise. Comment
les habitants vivant essentiellement des ressources de la terre et de la mer
peuvent-ils acquérir de si luxueuses villas et des véhicules si onéreux ?
L’explication nous sera donnée plus tard. La majorité des propriétaires serait
des autochtones de retour au pays après s’être expatriés à l’étranger où ils
auraient fait fortune. En effet beaucoup de carriacouans ont émigré au
Royaume-Uni, aux Etats-Unis ou dans les autres îles des Antilles à cause du manque d'emploi sur l’île. Ils retournent
au pays natal pour les vacances ou pour y prendre leur retraite.
Dans
la bay d’Hillsborough, le mouillage est assez inconfortable, nous quittons ce
lieu pour faire route vers Tyrell bay. Nous passons par Sandy Island, charmant
mouillage classé réserve marine.
Le site de Tyrell bay
n’est pas paradisiaque mais l’amabilité des habitants nous séduit. Ici pas de
gros voilier luxueux et pas de voilier de location. Carriacou située au sud des îles Grenadines de St
Vincent ne s’intègre guère aux programmes de croisière à la semaine déjà chargés.
Cet isolement maintient la dernière des Grenadines hors de la fréquentation
touristique intense. Son caractère authentique en est ainsi préservé. La
sécurité de l’abri nous permet de visiter l’île avec Simon, qui s’improvise
guide, avec son 4X4-sûrement le seul déglingué de l’île.
Au village de Winward
sur la côte au vent se perpétue la construction de «bateaux-pays» avec la même technique et les mêmes outils
rudimentaires d’antan. La construction ne se fait pas sur plan mais « à
l’œil ». Les habitants du village sont pour la plupart des descendants d'écossais
et d'irlandais.
Construction d'un bateau pays |
L’intérieur de l’île
est vallonné. Un massif dont les sommets atteignent presque 300 m occupe le
centre de l’île du nord au sud. Du sommet nous profitons d’un beau point de vue
sur la baie d’Hillsborough et de ses îlots. De l’autre côté un superbe panorama
sur Petite Martinique et de Petit Saint Vincent.
La plupart des
anciennes plantations ont été reconverties en petites cultures et en pâturages.
Manguiers, bananiers, papayers, arbres à pain prolifèrent ici. De nombreuses
chèvres élevées pour la viande et non pour le fromage broutent paisiblement.
Le calendrier affiche
déjà fin janvier. Nous n’avons pas le temps matériel pour aller faire un tour à
Grenade, et oui même en vacances la roue du temps tourne trop vite !
« Oh temps suspend ton vol… »
Rien à faire notre message n’est pas entendu ! Il nous faut penser à remonter vers la
Martinique où une V.I.P., notre fille Amélie, doit nous rejoindre pour une
semaine de vacances.
Ile de Petit Saint Vincent
Toujours au près serré
nous quittons Carriacou en direction d’Union. Le vent de nord-est nous
contraint à tirer des bords si bien que nous sommes si proches de Petit Saint
Vincent que nous décidons d’y faire relâche. Face à nous une magnifique plage
de sable blanc nous fait de l’œil.
Comment
résister ? L’ancre a du mal à crocher. Elle chasse et nous devons la
remonter pour mouiller un peu plus loin sur un fonds moins rebelle.
Petit Saint
Vincent est la dernière île des
Grenadines dépendant de St Vincent. Un relief assez élevé constitué par deux
collines, une immense barrière de corail et de très jolies plages sous le vent
font de PSV une petite île assez attrayante, à condition toutefois d’être
autorisé à la visiter. En effet PSV est une île privée. Le PSV Resort construit
par un businessman américain, actuellement géré par sa veuve, offre à ses
clients des bungalows de luxe. Les hôtes sont choyés. Sur l’île la règle d’or
est la quiétude. Pas de téléphone, pas de télévision, pas de casino ou de cabaret.
Chaque bungalow est équipé d’un mat de pavillon utilisé, non pas pour hisser
les couleurs nationales, mais pour appeler, selon un code de couleurs bien
défini, le personnel en cas de besoin. Les employés sont à leur écoute et
doivent surtout disposer d’une bonne vue et ne pas être daltoniens ! Des
gardes patrouillent en permanence et veillent au respect de la quiétude des
clients.
Nous débarquons sur
l’île et nous engageons sur la plage pour une petite ballade. Impossible nous
ne sommes pas clients et le périmètre autorisé aux plaisanciers est réduit à
peau de chagrin. Nous pouvons toutefois consommer un verre au bar …et
profiter de la mer sans restriction. Nous ne nous éternisons pas sur cette île
sur laquelle des gardiens (de la paix) surgissent tous les 100 mètres.
Plage de Petit St Vincent |
Ile d’Union
Nous quittons le
mouillage de PSV à l’aurore le lendemain matin et atteignons Union rapidement.
De nombreux hauts fonds bordent la côte menant à Clifton. Bien des bateaux y
finirent leurs jours. Nous espérons naviguer encore quelques mois aux Antilles
et ne souhaitons pas vraiment raccourcir notre séjour. Nous restons vigilants et
respectons scrupuleusement les instructions nautiques. De vigie plage avant,
telle une figure de proue, je veille à ce qu’aucun récif malin ne se jette sur
PHILEAS. Nous prenons un corps mort juste derrière la barrière de corail après
avoir contourné les récifs. Ce mouillage est magnifique, l’eau limpide révèle
là aussi un caléidoscope de couleurs qui séduit immédiatement même les plus
insensibles.
Barrière de corail à Clifton |
A terre, Clifton,
capitale de cette petite île, est très colorée, tout particulièrement le marché
aux fruits et aux légumes. Ici du bleu pour le stand de Jenny, du rose pour
celui d’Eileen qui vous propose aussi des jus de fruits frais divins. L’art
d’attirer le regard du chaland ! Robert, un français, installé là-bas avec
sa famille après avoir navigué sur un catamaran de 20 mètres, y tient une petite
boutique d’art et propose des peintures régionales et de l’artisanat local. Son
épouse confectionne des bijoux fantaisie.
Vue de Clifton |
Laurent, un autre
français, natif du Jura, est arrivé à Clifton il y a 17 ans en voilier avec un
skipper. Il est tombé amoureux d’Union et n’est jamais reparti (sauf pour des
vacances dans le Jura et à Sollies Pont*). Shipchandler, mécanicien, il nous a
été d’un grand secours. La commande de notre guindeau a décidé de finir ses
jours à PSV. Très ennuyeux ! Laurent a trouvé une solution en connectant à
une télécommande usagée (qu’il avait conservé au cas où) le cordon électrique
en bon état de la nôtre. Réparation efficace à moindre coût. Quel soulagement
pour nos biceps. Pas besoin de remonter 20 à 30 mètres de chaîne à la force de
nos bras de quinquagénaires !
Que demandez de plus ? |
Nous poursuivons notre
route vers le nord et arrivons bien salés- Philéas et équipage- à BEQUIA (lire
Bécoué). Nous connaissons déjà le mouillage de Port Elizabeth pour y avoir fait
une brève escale il y a deux semaines. Nous entendons cette fois visiter
l’intérieur de l’île et la côte au vent.
Ile de Bequia
Retour à BEQUIA où
nous prenons cette fois le temps de visiter l'intérieur de l'île. BEQUIA est
une île de marins et de bateaux. Les traditions ancestrales y perdurent encore.
Les bateaux sont construits sur la plage sans plan et avec des outils traditionnels.
La chasse à la baleine à bosse est encore autorisée mais les prises sont rares
car peu de pêcheurs sur l’île ont encore
l'expérience nécessaire pour les chasser. Les baleiniers sont autorisés à
capturer 4 baleines par an. La chasse s'effectue à bord d'une baleinière, au
moyen de harpons lancés à la main. En cas de capture la baleine est remorquée
sur la plage pour y être dépecée. B. Bardot n'a pas encore d'adeptes dans ce
petit coin du monde.
Notre visite de l'île
nous permet de découvrir des paysages magnifiques. Du mont Pleasant nous
surplombons l'admiralty bay où Philéas est mouillé.
Sur les routes de BEQUIA |
Au nord-est de l'île,
à Park beach, nous rencontrons un passionné de tortues. Depuis 1995 il consacre
son temps à la protection des tortues de mer, espèce en voie de disparition. Mr
Orton G. Brother King a plaisir à nous
présenter sa réserve regroupant 200 tortues de toutes tailles. Le site est
bordé de plages de sable doré dont plusieurs sont à l'abri, encastrées dans de
superbes criques.
Admiralty bay en contrebas |
3 février 2012 – Ile
de St Vincent
Il est temps de faire
route vers St Vincent, la plus grande des îles Grenadines mais certainement la
moins visitée. Elle a obtenu son indépendance de la Grande Bretagne en 1979. La
majorité des habitants vit au bord de la mer car la géographie de l'ile est
accidentée. Née des feux de la Soufrière, cette île tranche sur la carte
postale des Grenadines avec ses plages de sable noir. La partie intérieure de
l'île est très montagneuse et recouverte d'une vaste forêt tropicale. Le tourisme y est assez peu développé
contrairement à ses dépendances des Grenadines.
Cependant la découverte de l'île offre de nombreux sites naturels qui
valent essentiellement par leur aspect sauvage et par leur végétation
luxuriante.
L'agriculture est le
1er secteur économique de St Vincent. La terre de cette île volcanique est très
riche. Les habitants cultivent des fruits et légumes tropicaux et du ganja (cannabis
local). A ce propos Chateaubelair, bourg situé sur la côte nord-ouest est
considéré comme la plaque tournante de la région pour le trafic de drogue. Les
voiliers dérangent et n'y sont pas les bienvenus. Le comportement agressif des
trafiquants est dissuasif et peu de plaisanciers choisissent d’y faire escale.
Nous faisons escale à
Wallilabou, au cœur de St Vincent. Les fonds sont profonds. Des boat-boys nous
proposent leurs services pour prendre un corps mort et pour amarrer l’arrière
de Philéas sur la berge.
En 2003, Wallilabou a été pendant 6 mois le
site principal du tournage du film "le pirate des Caraïbes". Les
décors du film, quelque peu décrépis, restent visibles et attirent les plaisanciers
de passage. Des photos des acteurs prises pendant le tournage (Johny Depp,
Orlando Blum....) sont exposées dans une des bâtisses. Pendant toute la période
du tournage, la baie a été interdite aux plaisanciers.
Site du tournage du film "le pirate des Caraïbes |
Non loin de
Wallilabou, à 15 minutes de marche, au cœur d'un jardin botanique financé par
des fonds de l'Union Européenne, une petite cascade offre un moment de détente
aux visiteurs qui souhaitent se baigner dans ses eaux fraiches
Kingstown, la capitale
de l'île se trouve au sud-ouest. Nous nous y rendons en bus local. Une heure de grand danger, du
moins c'est ainsi que nous le percevons !
Le chauffeur roule "à tombeau ouvert" sans se soucier des
virages et des piétons. Le code de la route est inexistant ; les dépassements
en plein virage ou dans une côte n'étonnent personne. Les mains du
chauffeur, bien loin de la position à
10h10 enseignée dans nos auto-écoles, s'emmêlent,
se croisent, font des nœuds. Les inspecteurs d'auto-école français
délivreraient bien peu de permis ! Nous avons le sentiment de risquer davantage
notre vie ici qu'en traversant l'océan par fort coup de vent. Dans le minibus,
les passagers s'entassent au fur et à mesure des arrêts. Pas d'espace perdu. A
chaque arrêt s'installe un jeu de chaises musicales. Des passagers descendent
pour en laisser monter d'autres dans un petit coin et remontent à bord. Parfois
le chauffeur fait un détour pour récupérer un colis qu'il livrera en route, ou
pour prendre un passager dans la ruelle d'un village. Le client bien souvent ne
se hâte pas. Nous attendons son bon vouloir, puis poursuivons notre route
jusqu'à l'arrêt suivant. Lorsque le chauffeur estime que le bus est complet
nous filons vers notre destination. La musique reggae fait partie du voyage.
Les haut-parleurs sont de bonne qualité !! Au bout d'une heure nous arrivons à
Kingstown. Samedi, jour de marché, la ville grouille de monde. Nous découvrons
enfin un vrai marché avec des nombreux étals. Les fruits et légumes appellent
le consommateur. Nous y complèterons l'avitaillement du bord.
Au retour
l'entassement est à son paroxysme. Les colis et provisions s'ajoutent aux
passagers. Je suis coincée au milieu du bus sans espoir de bouger un orteil !
Très vite j'ai une crampe et ai hâte que le bus s'allège. Christian quant à
lui, insensible à l’inconfort, s’endort profondément …
Nous poursuivons notre
voyage jusqu'à Chateaubelair. A défaut de nous y rendre par la mer nous
empruntons la route. De Wallilabou à Chateaubelair la route étroite
devient beaucoup plus sinueuse et
montagneuse que celle menant à la capitale. Les paysages sont magnifiques.
Tantôt la mer nous accompagne, tantôt la montagne s'impose. Chateaubelair
finalement n'a rien d'attrayant. Sur la plage de sable noir nous sommes abordés
par un riverain qui s'enquiert de la raison de notre présence. Nous nous
installons face à la mer dans l'unique bar-restaurant de la plage et observons
les habitués des lieux. Parmi eux des jeunes hommes parés de grosses chaînes en
or autour du cou.
Le lendemain matin aux
premières lueurs de l'aube nous appareillons pour La Soufrière de Ste Lucie
avec un vent de secteur nord-est de force 6.
Ile Ste Lucie
Très au large de la
Soufrière, nous sommes abordés par Africa, un boat-boy qui nous propose un
corps mort. Nous déclinons mais le speed boat nous suit. Arrivés sur place le
mouillage est encombré. Le boat-boy réitère son offre. Nous nous amarrons à une
bouée devant le village de pêcheurs. Il s'empresse d'encaisser le prix de la
location de la bouée, qu'il affirme lui appartenir et ne s'attarde pas.
Très vite le véritable
propriétaire, un pêcheur, se fait connaître. Il connaît bien Africa pour sa
mauvaise réputation. Pas question pour lui de récupérer son auprès de ce
boat-boy malhonnête et violent. Gentiment, il nous permet de rester la
nuit. Nous n'avons pas l'intention de
rester davantage. Nous devons être à Fort de France au plus tard dans deux jours.
Pendant le bref séjour de notre fille nous partageons notre temps entre la Martinique et Ste Lucie. Les 2 pitons à Ste Lucie méritent bien de traverser à nouveau le canal et nous tenons à lui faire découvrir ce mouillage agréable et les alentours.
Notre prochaine
destination sera La Dominique après une petite escale technique au Marin en
Martinique pour maintenance.
Note :
* Solliès Pont est situé à une dizaine de kilomètres de Toulon
Note :
* Solliès Pont est situé à une dizaine de kilomètres de Toulon
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