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mercredi 31 décembre 2014

DES ILES GRENADINES A LA MARTINIQUE

Avant de rejoindre Clifton la capitale d’Union nous nous accordons une escale dans une baie peu fréquentée et encore sauvage, Chatham bay. Nous avons l’embarras du choix pour mouiller. Sur la plage quelques paillotes offrent des plats locaux. Vanessa de Sun Beach Eat recommandée par notre guide nautique Chris Doyle vient à notre rencontre avec son annexe et nous propose poissons et fruits de mer.

Nous nous laissons tenter par des langoustes grillées accompagnées d’un assortiment de bananes plantains, des fruits d’arbre à pains et quelques crudités. Un tel menu, plutôt dispendieux en France, est bien l’une des rares choses bon marché ici. A 19h00 nous rejoignons notre « restaurant » en annexe, pieds nus et lampe frontale à poste.
Le barbecue est prêt, trois belles demi-langoustes d’un kilo chacune sont disposées devant nous sur le grill. Seckie s’occupe de la cuisson tandis que Vanessa prépare les accompagnements et nous fait la conversation. C’est la magie des Antilles !


Le lendemain matin, installés dans le cockpit autour d’un petit déjeuner, nous observons fous de bassan et pélicans s’adonnant à la pêche intensive. Les fous de bassan disposent d’une bonne vision qui leur permet d’évaluer la profondeur de nage des poissons qu’ils consomment. Une chute libre de 30 ou 40 mètres se termine à une vitesse de près de 100 km heure au moment de l’impact. Airbag frontal et articulations spécifiques des ailes sont des options obligatoires pour ce style de pêche… 

Le pélican, quant à lui, de silhouette plus massive, alterne battements d’ailes et vols planés. Au théâtre des plagiaires, les pélicans plongent à la manière des fous de bassan, ramenant leurs longues ailes, mais s’enfonçant peu sous la surface. Le style n’a rien de gracieux mais la pêche s’avère efficace.
Avec regret nous quittons ce petit coin de paradis ; nous devons effectuer les formalités règlementaires d’entrée dans les Grenadines avant le weekend.

A Clifton nous retrouvons Robert et Annie dans leur boutique de souvenirs et artisanat fait main. Nous les avions rencontrés en 2012  (voir archives Philéas à Union  au lien  suivant :
Ils ont élus domicile aux Caraïbes depuis 40 ans et sont installés à Union depuis deux décennies. Leur fils Nicolas et leur belle-fille Linda proposent dans leur magasin situé à deux pâtés de maisons, des produits français : vins, pain, fromages, yaourts maisons. Père et fils sont pilotes, ils se rendent régulièrement en Martinique et à Grenade pour s’approvisionner avec leur petit avion. Les liaisons aériennes commerciales avec les îles voisines sont irrégulières et aléatoires.



La saison dernière, le chikungunya a sévi à Union comme dans toutes les Antilles. Rares sont ceux qui ont échappé aux piqûres des aedes femelles. Six mois après avoir fait un don du sang aux moustiques antillais, Robert est tout juste rétabli. Dans les rues de Clifton les victimes souffraient de douleurs articulaires et musculaires et, celles qui parvenaient courageusement à se déplacer, avaient des allures de petits vieux, le dos courbé, en appui sur des cannes ou des bâtons…
A bord nous sortons répulsifs et moustiquaires pour nous prémunir d’une attaque sournoise des moustiques inhospitaliers.

Place deClifton
A Union point de transformation depuis 2012, les kites surfeurs profitent de la générosité d’Eole et s’adonnent toujours à leur hobby à l’intérieur de la barrière de corail. Les hauts fonds restent aussi menaçants et demeurent peu ou pas balisés. Le plan d’eau est un superbe patchwork de couleurs variant du vert émeraude au bleu roi, rivalisant avec le ciel pour offrir à l’œil une palette étonnante de nuances subtiles. 

Les boat-boys, à l’affût du plaisancier, se ruent sur les voiliers en quête de mouillage. Aucun service n’est gratuit et si par mésaventure vous vous échouez, ils arrivent en nombre à grand renfort de cris destinés à déstabiliser l’imprudent, profitant de la confusion et de l’effet de surprise ; l’équipage n’a pas le temps d’analyser la situation qu’ils sont déjà agglutinés autour de la coque du malheureux tels des rémoras imposant leur service. Le prix de la prestation une fois le service rendu, est prohibitif, sans commune mesure avec les salaires locaux. Difficile de négocier à l’issue de la manœuvre, le ton monte et s’ensuit une vraie foire d’empoigne entre boat-boys pour la répartition du butin, les plus agressifs l’emportant sur les moins forts (en bouche…).

Notre prochaine étape est une escale aux réputées Tobago Cays, cinq petits îlots bordés d’une multitude de coraux, protégés du large par une grande barrière de corail appelée « fer à cheval » et plus à l’est par le récif nommé « fin du monde ». Le site est très couru par le tourisme nautique dans les Grenadines.
L’accès à ce petit paradis requiert une attention soutenue et une bonne visibilité. Une fois la porte franchie, le mouillage est bien protégé. Des plages de sable fin accueillent le nageur, la mer offre un caléidoscope de couleurs époustouflantes : du bleu pastel, azur et turquoise au vert tantôt pomme tantôt pâle. L’écume de la houle s’écrasant sur les hauts fonds coralliens apporte à ce tableau enchanteur et reposant une nuance de blanc neige. Impossible de résister à l’appel de la baignade dans ce décor parfait. En pleine saison les Tobago Cays sont victimes de leur succès et le cadre idyllique encombré de monocoques et maintenant de catamarans perd un peu de son attrait.  Nous en avons fait l’expérience en février 2012  et avons pris soin cette fois-ci d’éviter la période de fréquentation massive (voir archives Philéas aux îles Grenadines  http://rmphileas.blogspot.fr/2012_01_01_archive.html).

Passe d'accès aux Tobago cays
Un vrai bonheur.  Nous mouillons aux abords de Baradal, au-delà de la zone d’observation des tortues. Nous nous imprégnons de la beauté et de la sérénité du site avant de plonger dans l’eau cristalline. Palmes, masques et tubas sont de sortie, nous nageons contre le courant à la rencontre des tortues ; une, deux, trois puis quatre. Nous les suivons, restons à distance lorsqu’elles remontent à la surface de la mer pour respirer. Plus loin, plaquée sur le fonds sablonneux une raie pastenague fouit à la recherche de petits invertébrés. Ses yeux exorbités et sa couleur gris olivâtre lui donnent une allure peu engageante. Nous rejoignons Philéas portés cette fois par le courant. Nous prenons place pour le dernier spectacle de  la journée : le coucher de soleil d’un rouge flamboyant. Un beau cadeau de la nature et une invitation à prolonger notre séjour… Canouan attendra un peu !

Les vacanciers de fin d’année s’approprient peu à peu les mouillages devant Baradal et Petit Bateau, un dernier regard en arrière et nous quittons les Tobago Cays.

Canouan, petite île de moins de 10 km2 au relief très vallonné et assez dénudé a longtemps été délaissée et considérée comme le parent pauvre des Iles du Vent. Le potentiel touristique du littoral doté de très belles plages et le récif enserrant sa côte au vent n’a cependant pas échappé à un groupe d’investisseurs étrangers. Les premiers investissements encore timides ne modifièrent guère l’aspect sauvage de la côte puis…bulls et tractopelles rabotèrent les collines, débroussaillèrent les terrains, l’aérodrome existant fut agrandi. La « Compagnie de Développement des Resorts de Canouan » s’appropria et développa la moitié nord de l’île. Des enceintes et des points d’entrée contrôlés par des portes gardées assurent la tranquillité d’une clientèle de luxe. Visiteurs et locaux ont besoin d’autorisation pour accéder aux complexes hôteliers. L’aéroport a doublé de taille et une piste est dédiée aux jets privés. Les petites maisons traditionnelles en bois et les champs ont cédé la place à des ensembles de grandes maisons luxueuses. Un golf de 18 trous a été paysagé face aux vagues de l’océan. Un hôtel  très haut de gamme doublé d’un casino et de fastueux cottages sur le sommet des collines ou en bordure de la plage attire une clientèle fortunée.
Si les investisseurs profitent de cette manne touristique, côté culture et architecture l’île a perdu de son authenticité. A Charleston les ressources restent néanmoins limitées à quelques échoppes pour des produits de base importés de l’île de St Vincent, y compris le pain ; les touristes séjournant dans les complexes luxueux sont chouchoutés et n’ont nul besoin de préparer eux-mêmes leur repas. 
Dans les rues de Charleston nous rencontrons des habitants souvent désœuvrés assis le long des maisons et sirotant des bières ; mais également des 4X4 récents appartenant probablement aux responsables des différents établissements hôteliers. Les autochtones engagent aisément la discussion, proposent des tours de l’île en taxi. Notre séjour à Canouan est bref, le temps de satisfaire notre curiosité puis nous appareillons pour Bequia pour y passer Noël.

Le 24 décembre à midi nous prenons une bouée à Port Elizabeth près du rivage pour faciliter nos allées et venues à terre. L’ambiance « fête de la nativité » est moins marquée ici que dans les Antilles Françaises. En revanche la messe de minuit est animée par des chants d’allégresse. Les paroissiennes arborent des tenues du dimanche et des chapeaux élégants comme il en était l’usage en France il y a encore 30 ou 40 ans.

Nous nous rapprochons doucement de la Martinique où nous sommes attendus pour le réveillon de la St Sylvestre. Auparavant un mouillage à Ste Lucie s’inscrit dans les « méritants plus qu’un détour » et avec un quatre étoiles  attribué par la rédactrice. Alain comme tous les MédHermionistes m’en ont tellement entendu parler, en des termes plus qu’élogieux, qu’il est impatient de voir au loin se dessiner ces deux pics majestueux. Séjourner au cœur de ce décor féerique est un ravissement. Je ne m’en lasse pas et j’ai fait des émules parmi les amis qui m’avoueront par après : « il faut avoir au moins une fois dans sa vie mouillé dans ce cadre de rêve. » Ce petit paradis clôturera notre séjour hors de France.

Nous nous engageons dans le canal de Ste Lucie, un coup d’œil à Marigot bay autrefois décrite comme décor de carte postale puis un arrêt à Rodney bay bordée d’hôtels de moyennes et hauts de gamme. Là aussi des gardes assurent une étroite surveillance aux points d’accès côté mer et côté terre. De bruyants scooters des mers  évoluent sur le plan d’eau. La nature et le silence ne sont plus rois ici, sur la côte d’azur de Ste Lucie.

Le 27 décembre 2014 soit 107 jours après notre appareillage de Toulon une terre française accueille Philéas et son équipage. Au loin le rocher du Diamant très caractéristique de la côte ouest de la Martinique se dessine devant nous. Nous tirons nos derniers bords avant d’atteindre la grande plage de Ste Anne.   

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