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mercredi 22 juillet 2015

NOS COUSINS CANADIENS NOUS ACCUEILLENT


La tempête tropicale « Claudette » s’éloigne. Les yeux rivés sur les cartes de prévisions météorologiques de la NOAA(1), nous sommes rassurés.  Une dernière consultation du site de gestion des cyclones de Miami et nous larguons les amarres sans attendre davantage.

Après deux mois et demi de navigation dans les eaux américaines, le pavillon étoilé est affalé : la silhouette des côtes américaines s’estompe.  Philéas maintient son cap toujours plus loin et toujours plus nord. Bientôt une feuille d’érable rouge sur fond blanc est hissée dans la mature. Lunenburg, petite ville de Nouvelle Ecosse aux maisons multicolores comptant un peu moins de 3 000 âmes accueille la poignée d’irréductibles MédHermionistes. Mais la débandade annoncée se précise ; le cercle des fidèles de l’Hermione se réduit à quatre voiliers lors de son escale dans le berceau de l’Acadie. Trois retardataires font l’école buissonnière et rejoignent la bourgade canadienne après quelques détours.


Port de pêche et ancien centre de construction navale d’importance,Lunenburg n’est guère équipée pour recevoir des
plaisanciers mais la municipalité met gracieusement à la disposition des navigateurs venus d’outre-Atlantique des pontons au cœur de la ville. Ils sont sympathiques ces canadiens, toujours prêts à se mettre en quatre pour nous aider… 

Que se passe-t-il donc aujourd'hui ?

10h00 les carillons de l’église St John, située en surplomb des quais, annoncent l’arrivée de la belle frégate : 21 coups de canons jaillissent de l’Hermione et se perdent dans les rues de la cité hôte en signe de salut. Un phoque intrigué par ce tapage  inhabituel, pointe sa tête hors de l’eau, tandis que deux cents personnes se pressent sur les quais pour admirer la grande dame venue de France.



Philéas accueille la belle frégate
En signe de courtoisie, la marine canadienne a spécialement mandaté pour l’occasion un navire de guerre pour accueillir et escorter aux abords de Lunenburg la frégate française. Une trentaine de bateaux locaux viennent la saluer de près dont la très belle et non moins populaire goélette Bluenose II, réplique de la Bluenose qui remporta le trophée de la course entre pêcheurs de la côte Atlantique entre 1921 et 1938. 
Accueil des Acadiens
Sous les yeux d’une foule captivée, l’Hermione accoste bâbord à quai devant le musée des pêches de l’Atlantique, pour une escale courte mais de forte intensité. L’équipage entonne une série de chants de marins pour le plus grand plaisir des spectateurs.

Les couleurs du club nautique de la marine à Toulon intriguent la population, admirative de notre engagement et de notre constance. La durée, surtout, de notre croisière l’interpelle, 10 à 11 mois, plus qu’une campagne de pêche !


 Rachel Bailey, maire de Lunenburg

La presse et la télévision locales s’intéressent à ce noyau dur de MédHermionistes et dépêchent cameramen et journalistes pour une interview. Les autorités présentes sur le quai, plus accessibles qu’aux Etats-Unis,  s’entretiennent en toute simplicité avec la flottille accompagnatrice. 

La verve si théâtrale des « dignitaires » étasuniens est restée de l’autre côté de la frontière américano-canadienne. Les discours, d’un style pionnier plutôt agréable, débutent avec l’allocution des notables locaux.




L’accent est mis sur les relations amicales franco-canadiennes que l’Hermione consolide par cette escale, la dernière en Amérique du Nord dans cette ravissante petite ville classée au patrimoine mondial de l’UNESCO.

Patrice, notre nouvel équipier, ancien de Médatlan et de MédHermione 1ère phase, toujours aussi dynamique et bout en train nous rejoint dans cette bourgade de Nouvelle Ecosse avec un rayon de soleil méditerranéen dans son sac, rayon qui malheureusement ne sera qu’éphémère...





Ah le Canada ! Tout est grand ici : les paysages, les routes, les camping-cars (de la taille d’un bus parfois et remorquant leur propre 4X4 pour les petites courses en ville). Ah ces Canadiens ! Ils sont fiers de leur passé de colons et cet esprit se ressent dans leur façon d’être et de se comporter.  

Si le thermomètre affiche depuis notre approche des côtes canadiennes une chute significative, l’accueil spontané et chaleureux de la population nous réchauffe le cœur. Ce souvenir restera gravé dans nos mémoires. « Les gens du nord ont dans le cœur le soleil qu’ils n’ont pas dehors(2) ». 

Cette escale est bien courte mais nous avons encore du chemin pour rejoindre St Pierre et Miquelon, notre prochaine destination. Nous n’oublions pas que notre route nous met en plein sur la trajectoire des dépressions qui, elles-aussi traversent…


Les nuits commencent à devenir fraîches et les duvets et couvertures, sortent des soutes. Le courant du Labrador, cela n’a l’air de rien quand on le voit mentionné sur une carte marine, mais c’est bien lui le responsable. Lunenburg se trouve à la latitude de Bordeaux, mais à Bordeaux au mois d’août, qui se pare de deux polaires et d’un ciré complet, sans compter le bonnet, pour naviguer ? De surcroît, au près serré, Philéas avance peu dans la bonne direction. Au bout de deux jours de mer et suite aux grognements de l’équipage et de l’annonce de vent fort, le skipper se laisse fléchir et le dernier bord de près, judicieusement choisi, nous amène tout droit à Louisbourg situé sur l’ile du Cap Breton, notre dernière courte escale canadienne.


Louisbourg, a longtemps été un important port morutier de transformation et ce, dès le XVIIIème siècle ; sa rade bien protégée des glaces et des tempêtes attirait de nombreux bateaux de pêche dont bien sûr beaucoup de Français. Une forteresse bâtie sous Louis XV témoigne encore de ce passé français.


Brume et froid sont au rendez-vous, certes, mais l’accueil agréable des locaux, le plaisir d’une dernière escale canadienne attrapée à la volée et l’attrait de l’inconnu effacent vite ces désagréments. Un repas gargantuesque de crabes des neiges et l’équipage rassasié et reposé est enclin à reprendre la mer. 150 nautiques nous séparent de St Pierre et pas des moindres, il nous faut traverser l’embouchure du St Laurent réputé pour ses violents coups de vents, sa brume persistante et ses nombreux pêcheurs fréquentant les bancs du large. Et bien ma foi, il y a sans doute une bonne étoile pour Philéas, bien qu’elle soit restée dans le brouillard, cette petite traversée reste clémente. Nous avons cependant hâte de mettre un peu de sud dans notre est….



 BREVE Présentation de LUNENBURG

La ville de Lunenburg est située sur un isthme reliant la presqu’île de Blue Rochs au continent. Elle est bordée au sud par le havre de Lunenburg et au nord par le havre arrière de Lunenburg.

Répondant à une publicité lancée en 1749, environ 2700 protestants étrangers s’établissent à Lunenburg en 1753, la ville devient alors la seconde colonie britannique en Nouvelle Ecosse après Halifax. Les premiers colons proviennent principalement de la vallée du Rhin, en Allemagne, des cantons francophones et germanophones de Suisse et de la principauté de Montbéliard. La couronne britannique encourageait l’établissement de ces immigrants protestants pour peupler la région et éviter le retour des Acadiens catholiques

La vieille ville de Lunenburg est devenue un site historique national en 1992 et est classé au patrimoine mondial de l’Unesco depuis 1995 afin de d’assurer la protection de l’architecture unique de Lunenburg, modèle de style colonial britannique en Amérique du Nord.

Fait intéressant encore, la réplique du Bounty figurant dans le film « Les révoltés du Bounty » (film tourné en 1962) a été construite au chantier naval de Lunenburg dans les années 1960. Il en est de même pour la réplique du Rose apparaissant dans le film Master and commander – de l’autre côté du monde-.


au sujet de Louisbourg

Au cours des années 1620 le roi Charles 1er d’Ecosse et d’Angleterre envoya une troupe d’Ecossais pour fonder une colonie sous le nom de Novia Scotia(3). A cet effet il fonda le baronnetage de Nouvelle Ecosse ; ceux qui désiraient acquérir le titre nobiliaire de Baronnet devaient s’acquitter d’une taxe servant à l’établissement de la colonie et ils recevaient en contrepartie une dotation en terres. Or, lors de la signature d’un accord de  paix avec la France, la Couronne écossaise/anglaise céda le territoire à la France et les colons écossais durent abandonner leur mission.

La colonisation française se poursuivit dans toute la région des provinces maritimes actuelles, en étant centrée sur ce qui constitue aujourd’hui la péninsule de Nouvelle Ecosse. Cette Acadie péninsulaire tomba toutefois sous juridiction britannique après le traité d’Utrecht en 1713. Une Acadie sous contrôle français perdura dans l’île Saint Jean (île du Prince Edouard) et l’île Royale (île du Cap Breton). Le Nouveau Brunswick actuel était alors un territoire disputé.
Suite à la perte de l’Acadie péninsulaire, la forteresse française de Louisbourg fut construite sur  l’île Royale afin de permettre aux marchands et aux pêcheurs de commercer et de pêcher la morue. Louisbourg a également joué un rôle stratégique de surveillance des approches maritimes en provenance du fleuve Saint Laurent. Louisbourg fut prise par les forces continentales britanno-américaines, puis retournée à la France en 1748 (à la fin de la guerre de Succession d’Autriche). Pendant la guerre des Sept Ans, elle retourna aux mains des Britanniques en 1758, avant la conquête de Québec. La ville fut rasée et ses habitants déportés en France.



Trajet Boston - Nouvelle Ecosse-Cap Breton- St Pierre et Miquelon




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(1)    Carte NOAA : carte météo élaborée par des prévisionnistes du National Oceanografic & Atmosferic Agency contrairement aux fichiers GRIB qui ne délivrent que des données brutes.
(2)     Les gens du nord : chanson d’Enrico Macias.
(3)     Nouvelle Ecosse

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