16 mars 2012 - 7 heures du matin – En route vers La Guadeloupe
Avec
regret nous quittons Marie Galante pour l'île papillon, surnom donné à la
Guadeloupe du fait de sa forme. L'approche de St François, notre destination,
ne tolère aucun laxisme. De nombreuses cayes(1) parsèment les fonds.
Heureusement l'endroit est bien balisé. Nous nous engageons, à marée haute,
dans la passe Champagne menant au port
en respectant scrupuleusement la signalisation nautique et mouillons par moins
de deux mètres d’eau derrière la barrière de corail. A l'intérieur du bassin
les fonds sont généralement de 2,50 m mais dans le chenal ils peuvent être
moindres par suite d'ensablement. L'accès et la sortie par trop forte houle
d'est est à déconseiller (ce qui n'est pas le cas aujourd'hui) et mieux vaut
éviter de tomber en panne de moteur...
Philéas a un tirant d'eau de 1,60, le marnage ne devrait pas nous
inquiéter. Le capitaine cependant veille "aux fonds" et, sonde en
main, préfère vérifier la hauteur d'eau dans notre périmètre d'évitage. Pas de
souci, tout va bien.
Mouillage de St François |
Saint
François, village de pêcheurs de 14 000 âmes
travaille sa réputation touristique. Ses atouts : son golf, sa marina
récemment rénovée, son aérodrome, ses plages, sa proximité de la pointe des
châteaux et les îlets avoisinants en font une station balnéaire en plein essor.
C'est également de St François que partent les navettes pour La Désirade.
La Désirade sans
Philéas
Le
littoral abrupt de la Désirade n'offrant aucun abri naturel et le petit port de
Grande Anse accessible uniquement aux voiliers à faible tirant d'eau ne
permettent pas d'envisager une escale avec Philéas. Nous nous y rendons donc,
pour une fois, par navette maritime. A mi-parcours un des passagers s'exclame :
"des baleines, des baleines !!!". Nous assistons à un ballet aquatique.
Le patron de la navette ralentit l'allure pour nous permettre de profiter du
spectacle. Les baleines semblent affectionner cet endroit car les rencontres y
sont fréquentes à cette époque de l'année. Dix minutes plus tard, nous pénétrons
dans le port de Beauséjour, capitale de
l'île. Peu de place, peu de fonds, une côte fouettée par la houle, notre
décision de laisser Philéas à St François fut une décision sage.
Porte orientale
de l'archipel guadeloupéen, la Désirade émergeant à 276 m au dessus d'abysses
profonds de 4700 m est une île des extrêmes. Le long de ses côtes nord et est,
fouettée par les alizés, la navigation est difficile. L'île, immense plateau
d'altitude modeste coupé de quelques ravines, est desservie par une unique
route que nous empruntons en scooter. Nous y découvrons des plages, des villages de pêcheurs, des vestiges de la
cotonnerie, un cimetière marin, une ancienne station météo fouettée par les vents
et même les ruines de l'ancienne léproserie datant du XVIII° siècle. En effet,
l'est de la Désirade accueillit pendant plus de 200 ans dans sa léproserie les
malades de Guadeloupe. Quelques dizaines d'années plus tard, ce fut le tour
d'autres infortunés : les mauvais sujets du roi de France qui furent
contraints à s'exiler à La Désirade.
pointe Séraphine |
Notre
1ère rencontre avec l’iguane antillais, reptile herbivore à l'allure
préhistorique peu engageante, se fait à la pointe des Colibris au sud de l'île.
Leur nombre nous impressionne. Nous sommes sur leur territoire mais notre
passage semble ne pas les perturber.
Philéas aux îles
de la Petite Terre
20
mars, vent d'est modéré et peu de houle. Les conditions indispensables à une
incursion aux deux îles inhabitées de la Petite Terre sont réunies. Il nous
reste à conjuguer ces éléments à la
marée pour nous engager dans la passe de cet archipel protégé par une barrière
de corail.
Nous
arrivons en fin de matinée et nous amarrons à l'une des bouées disponibles
installées par le parc national. La zone est déclarée réserve naturelle depuis
1998 et il est interdit d'y jeter l'ancre. Terre de Haut et Terre de Bas
situées à 11 miles au sud-est de St François sont gérées par l'office national
des forêts et dépendent de La Désirade. Cet archipel appartenait à une famille
de notaires expropriée pour raison d'utilité publique. Emergence d'un plateau
corallien soulevé jadis par la poussée des volcans de Basse Terre (Guadeloupe) les îlets de la Petite Terre
recèlent une grande diversité biologique.
Nous glissons dans une eau peu profonde équipés de
palmes, masque et tuba et nageons vers l'extrémité nord-est de Terre de Bas.
Les fonds sont dominés par des coraux de feu et corne d'élan. De nombreuses
espèces de poissons dont certaines se déplacent par bancs y abondent :
chirurgiens bleus, balistes, anges des Caraïbes, poissons trompettes,
perroquets et bien d'autres. Le courant
est fort et emporterait aisément le nageur. Lorsque distraite par le spectacle
sous-marin j'en oublie la prudence, Christian est là pour me rappeler à
l'ordre. Plus loin dans des eaux plus
calmes des raies tentent de se dissimuler dans le sable. Trop tard nous les
avons vues mais ne les dérangeons pas. Quelques requins citron juvéniles
fréquentent également les lieux. Ce squale de couleur jaunâtre facilement
identifiable à ses deux nageoires dorsales reste là 7 à 8 mois pour grandir à
l'abri des dangers. Une fois mature, il franchit la barrière récifale pour
gagner la haute mer et... devenir un sérieux prédateur.
requin citron |
Vers
15h30 les catamarans "à touristes journaliers" appareillent. L'île
désertée nous appartient. Nous disposons encore de quelques heures de clarté
pour l'explorer.
Sur le
bord de la plage des pluviers courent de façon comique et finissent par
s'envoler à notre approche dévoilant ainsi leur plumage moucheté. Plus loin un
héron vert dont la couleur se confond à un récif corallien à moitié immergé est
en quête d'un repas. Sa posture est similaire à celle d'un chat guettant une
souris. Etonnant ! Côté terre, des sucriers à ventre jaune volent de feuille en
feuille. Nous empruntons le
pluviers |
chemin balisé par l'office national des forêts. A son extré- mité
est se dresse le p h a r e du "bout du monde", premier phare de
Guadeloupe.
Inauguré le 9 juillet de l'année 1840, il ne fut automatisé et électrifié qu'en 1972 date à laquelle les derniers gardiens quittèrent l'île.
Petite
Terre est également l'un des derniers sanctuaires de l'iguane antillais, espèce
présente uniquement dans la moitié nord des Petites Antilles. Elle abriterait à
elle seule un tiers de la population mondiale. Le mâle peut atteindre 1,5 m et
peser 3,5 kg. Mais n'ayez crainte, il est végétarien et totalement inoffensif.
La femelle plus petite pond entre juin et août et dispose ses œufs dans des
terriers. Les jeunes iguanes sont de couleur vert-pomme. En vieillissant leur
corps s'assombrit.
D'autres
lézards, beaucoup plus petits, fréquentent les lieux. Le plus commun est
l'anolis, espèce endémique des îles de la Petite Terre.
De
retour sur Philéas, j'observe les sternes se posant sur les bouées d'amarrage
inoccupées. Leur territoire, Terre de Haut est une réserve ornicole interdite
aux visiteurs. Les oiseaux y nichent en toute quiétude. La petite sterne est une
espèce hivernant à Petite Terre. La femelle pond deux œufs à même le sol.
Attention si vous vous pénétrez sur son territoire, elle saura vous repousser
par son agressivité.
sterne sur une bouée |
Ce
mouillage est également propice aux
rencontres et aux échanges. Les marins aiment à se réunir autour d'un ti ‘punch
à la tombée de la nuit. Nous faisons connaissance de Jean-François, un suisse
de Genève et de sa fille. A peine arrivée, Alice nous salue par un
"bonjour les voisins" qui nous fait sourire. Jean-François n'est pas un riche banquier,
tous les suisses ne le sont pas, nous dit-il, mais un informaticien en congé
sabbatique, moniteur de voiles qui a su transmettre sa passion de la mer à sa
fille, elle aussi monitrice. Son épouse et son fils peu attirés par Neptune et
surtout très incommodés par le roulis et le tangage préfèrent les rejoindre
lors d'escales.
Nous
retrouvons également nos amis du voilier Athos, rencontrés en Dominique et Gigi
le Cherbourgeois, notre voisin de mouillage à Marie-Galante.
Le retour de
Philéas en Guadeloupe
A
l'approche du weekend nous quittons ce petit paradis très prisé par les
Pointois(2). Nous souhaitons garder une image idyllique de ces îlets
et préférons nous éloigner du tourisme de masse. Et puis nous avons quelques
travaux à faire. La consistance de l'huile du sail drive nous inquiète. Nous
n'avons pas de mayonnaise (ou pas encore) mais le niveau monte. Une mise à sec
de Philéas n'est pas à écarter. Nous rejoignons Pointe à Pitre et ses moyens
techniques.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire