FIN DES TRIBULATIONS DE
PHILEAS AUX ANTILLES
L'APPEL DES BERMUDES
L'APPEL DES BERMUDES
15 mai 2012 - Anse Colombier St
Barthélémy
Vendredi 15
mai, cette date nous paraissait bien lointaine lorsque mi-décembre 2011 nous avons
abordé les côtes martiniquaises. Pendant 5 mois Philéas a vogué d'île en île au
gré de l'humeur de son équipage. Mais voilà le glas a sonné. De notre mouillage
anse colombier, il nous semble entendre le vuvuzela rassembleur de notre
président, organisateur de notre rallye. Nous remontons l'ancre et faisons
route vers Gustavia, port de St Barthélémy -St Barth pour les intimes- où nous avons
rendez-vous avec l'ensemble de la flotte MEDATLAN. Une tortue sort la tête de
l'eau, puis une deuxième. Sont-elles venues nous dire au revoir ? Trois
nautiques plus loin nous nous engageons dans la rade de Gustavia.
7 voiliers de la flotte Médatlan |
Quelques
voiliers du rallye, guidon(1) à poste, sont déjà arrivés. Nous
mouillons l'ancre et nous amarrons cul
à quai à l'emplacement réservé. Avec
grand plaisir nous retrouvons les anciens de la traversée aller et faisons
connaissance avec les nouveaux medatlantistes. Les équipages des voiliers
traversant l'atlantique dans le sens
ouest-est sont renouvelés de deux tiers. Seulement treize des trente-sept
"altantistes" initiaux se lancent dans l'aventure retour. Sur les
deux bateaux du club nautique seuls
trois navigateurs effectuent le retour dont Jack, skipper de Bellatrix à
l'aller et d'Orion au retour. Nous sommes heureux d'accueillir à bord de
Philéas Laurent, équipier sur Orion à l'aller. La flotte quant à elle reste à
peu près constante. Ysatis armée par les marins pompiers et Ocambo ne se joindront pas à nous. En
revanche NAJAS complète notre flottille.
Pendant les
trois jours passés à St Barth l'activité bat son plein. Skippers et équipiers
peaufinent leurs préparatifs. Le tourisme sera pour une autre fois.
Une atmosphère
de fin de saison touristique règne sur
St Barth. La jet set et les yachts luxueux ont déserté l'île
probablement pour se retrouver au festival de Cannes. Seule l'arrivée de la
course AG2R (16 voiliers régatant entre Concarneau et St Barth) anime le port de Gustavia.
St Barthélémy
Vendredi 18
mai, 09h30, la corne de brume de notre président retentit et annonce le dernier
briefing avant le coup d'envoi de la traversée retour. Echanges de vues,
d'informations météo, choix des routes, la parole est aux skippers. La tendance
est à une route directe Antilles-Açores. Seuls trois voiliers dont Philéas
optent pour un trajet via les Bermudes.
Un arrêt aux Bermudes est une occasion,
peut-être unique, de faire escale dans cette île où nous n'irons certainement
jamais en vacances. De surcroît nous espérons échapper aux calmes de ce que les
Anglais appellent les "horses latitudes" (2), en
empruntant la route du nord. Cette option de route semble moins prisée de nos
jours. La plupart des plaisanciers du XXI° siècle disposent de chevaux vapeur
puissants et embarquent de grande quantité de gasoil pour pouvoir, le cas
échéant, s'échapper du piège de la route directe. Au début de l'ère de la
voile, l'option "Bermudes" était courante, peu de navigateurs risquaient la panne de vent quasi certaine.
Briefing avant le départ |
EN ROUTE VERS LES
BERMUDES
sur le quai à Gustavia |
Pendant deux
jours les embruns arrosent abondamment notre départ des Antilles. Philéas
embarque en souvenir de généreux paquets de mer dans le cockpit. Les cirés font
leur apparition prématurément. Le temps est gris, les grains s'enchaînent. Les
Antilles c'est fini... Nous sommes indéniablement dans le "bain" du
retour. Point positif toutefois le vent fait partie du voyage et Philéas, au
largue, file entre 7,8 et 8,4 nœuds. Le troisième
jour le soleil pointe son nez, la houle s'est assagie. Les cirés restent
suspendus dans le local technique. L'équipage séjourne dans le cockpit par
plaisir et non plus par obligation. Laurent sort son matériel de pêche. Va-t-il
améliorer l'ordinaire ?
Le vent
faiblit peu à peu, force 3 puis 2 et passe de l'est au sud-sud-est. Pas de
surprise, monsieur Météo et ses fichiers GRIB l'avaient prédit. Notre vitesse s'en ressent. Nous hissons le spi et continuons à avancer honorablement.
Tout va
parfaitement bien à bord jusqu'à la rupture de la poulie de drisse de spi. La
responsable est vite identifiée. La manille a cédé, il faut la remplacer si
nous ne voulons pas nous priver de notre spi. Une séance de musculation
s'impose. Laurent, au winch, hisse en haut du mât Christian notre skipper
voltigeur. La mer est peu agitée mais la houle taquine -ou curieuse- vient de
temps à autre se frotter à Philéas. Christian suspendu en haut du mât peste
comme sait le faire un bosco(4). La manille remplacée, nous hissons
à nouveau notre spi pour profiter au maximum du moindre souffle de vent qui va
encore baisser d'intensité dans les heures à venir. Le temps est de plus en
plus instable. Nous traversons des lignes de grains, le vent change de
secteur avec les grains et nous passons
notre temps à affaler puis à hisser le spi. La nuit risque d'être agitée.
Peut-être la dernière avant notre arrivée aux Bermudes !
Durant la nuit
nous avançons cahin-caha. Le vent faiblit progressivement. Peu avant trois
heures du matin, plus un souffle de vent, plus une risée ne viennent chatouiller
même légèrement les voiles. Le loch affiche une vitesse nulle. Philéas est
encalminé à 75 nautiques de notre destination. Nous cédons à la technologie et
démarrons le moteur. Le jour se lève, le soleil est coiffé d'un halo
blanchâtre. Le ciel laiteux et la mer d'huile créent une atmosphère étrange. D’après
les fichiers GRIB(5) le vent ne fera pas son apparition avant
quelques jours. Le moment fatidique est arrivé, nous démarrons le moteur tout
en conservant notre grand voile hissée pour plus de confort. Durant toute la
journée la mer sera d’huile et aucun souffle de vent ne viendra la rider même
légèrement. Nous gisons là au cœur d'un monde de science fiction, dénué de vie,
impression créée par un paysage d'apparence irréelle. Tout est trop calme, un peu
comme un lendemain d'apocalypse. Toute la journée la mer et le vent restent
obstinément léthargiques. Philéas amputé de ses voiles fait route tristement
-et bruyamment- au moteur.
En fin d'après
midi les contours de l'archipel plat des Bermudes se devinent au loin. Notre
présence est détectée par le poste de surveillance maritime bermudien. A une
quinzaine de nautiques de notre point d'atterrissage, la station radio nous
contacte par VHF(6) et nous soumet à un véritable
interrogatoire : longueur, largeur,
tirant d’eau de Philéas, couleur de coque, nombre de personnes à bord, port
d’attache et numéro d’immatriculation, dernier port d’escale, destination
suivante, durée prévue de notre séjour aux Bermudes mais également type du
matériel de sécurité embarqué à bord, indicatif d’appel VHF, numéro de notre
téléphone satellite, marque du radeau de sauvetage etc.….
Nous arrivons
dans une île britannique, nous devons montrer « patte blanche » les autorités sont strictes et veulent tout
savoir hormis l'âge du capitaine ! Le phare de St David, en fonction depuis
1879 se dresse sur notre avant bâbord. Avant d'embouquer l'entrée du chenal
menant à St George nous reprenons contact avec la vigie. Nous sommes
autorisés à rentrer. Un douanier sympathique, plein d’humour –attitude si
rare qu'elle mérite d'être signalée- nous accueille sur le quai de la douane,
amarre les aussières de Philéas et nous invite à effectuer les formalités dans
son bureau.
Au terme de 880
nautiques parcourus depuis notre départ de St Barthélémy et de 6 jours et demi
de navigation nous jetons la pioche(7) dans la rade de St George.
Bellatrix et Orion les deux autres voiliers ayant opté pour un retour via Les
Bermudes, nous accueillent sur un air de corne de brume enrouée(6).
Tradition MEDATLAN oblige !
L'ARCHIPEL DES BERMUDES
Vendredi 25 mai 2012 – Journée tourisme et
découverte
Les Bermudes,
le Cap de Bonne Espérance, le Cap Horn.... il est des endroits mythiques qui
suscitent la curiosité. Lorsque l'imagination et la réalité se rejoignent, quel
bonheur ! Au premier coup d'œil -et au second aussi- Les Bermudes nous
plaisent.
Les Bermudes territoire d'outre-mer britannique situé dans le nord de l'océan atlantique, à l'ouest de la mer des Sargasses, se composent de 123 petites îles de corail au climat sub-tropical. Les précipitations y sont heureusement suffisantes pour alimenter l'archipel, dénué de fleuve ou lac d'eau douce. Sa superficie est de 53 km2. Les îles principales sont : Grande Bermude, l'île Saint George's, l'île Saint David's et l'île Somerset.
Les Bermudes territoire d'outre-mer britannique situé dans le nord de l'océan atlantique, à l'ouest de la mer des Sargasses, se composent de 123 petites îles de corail au climat sub-tropical. Les précipitations y sont heureusement suffisantes pour alimenter l'archipel, dénué de fleuve ou lac d'eau douce. Sa superficie est de 53 km2. Les îles principales sont : Grande Bermude, l'île Saint George's, l'île Saint David's et l'île Somerset.
L'archipel des
Bermudes doit son nom au navigateur espagnol Juan de Bermúdez qui le découvrit
en 1515.
Bermuda, nom
anglais de ces îles est dérivé du nom des Bermudes où les policiers britanniques
portaient ce short qui descendait jusqu'aux genoux. Il s'agit aussi de la tenue
pour les hommes d'affaires qui portent le bermuda avec un blazer, chemise à
manches courtes, cravate ou pas, chaussettes jusqu'aux genoux et chaussures de
ville. Le bermuda est toujours porté aujourd'hui.
L’élégance bermudienne à Hamilton
Des Anglais y
établirent des bases dès 1609 à la suite d'un naufrage et fondèrent la première
capitale Saint-George en 1612. Au début du XXe siècle, alors que les moyens de
transport et de communication étaient en plein essor, les Bermudes devinrent
une destination très à la mode pour les riches touristes britanniques,
américains et canadiens.
Pendant la
Seconde Guerre mondiale, les Bermudes devinrent une importante base militaire
du fait de leur position dans l'océan Atlantique. En 1941, les États-Unis
passèrent un accord avec le Royaume-Uni. En échange de la cession de destroyers
américains, les Britanniques concédaient aux Américains, pour une durée de 99
ans, un terrain dans le but d'y établir des bases militaires aériennes et
navales.
À partir du
1er septembre 1995, les deux bases américaines cessèrent de fonctionner ainsi
que les bases britannique et canadienne.
Les Bermudes,
pavillon de complaisance et paradis fiscal sont surtout connues dans le monde
de la finance pour leur système concernant les sociétés d'assurance et de
captives de réassurance. De nombreux riches Américains sont des résidents
bermudiens.
Le tourisme
est la deuxième source de revenus de l'archipel. Un demi-million de visiteurs
essentiellement américains (80%) sont dénombrés chaque année. La réglementation
locale n'autorise pas le touriste à
louer une voiture, il devra se contenter d'un scooter ou emprunter les
transports en commun, fort bien organisés.
Touristes à Hamilton |
Hamilton, la
capitale est le siège de nombreuses compagnies d'assurance internationales.
Nous nous y rendons en bus, excellente occasion de découvrir l'intérieur de
l'île. La route longe d'innombrables petites criques occupées par quelques bateaux à moteur et
petits voiliers. Un parfum de Bretagne ! Les récifs des Bermudes sont d'une
étendue et d'une complexité extraordinaire. Un chenal bien balisé mais d'apparence
compliquée serpente jusqu'à Hamilton. Côté terre, les hibiscus d'un rouge
soutenu attirent le regard. Les innombrables pandanus ajoutent une touche très
tropicale à ce charmant archipel. Cet extraordinaire patchwork surprend et
enchante l'œil sensible à la beauté de la nature.
A la maison des arts |
L'escale de 4
à 5 jours programmée à St George nous offre le luxe de diversifier nos
activités : travaux de maintenance, farniente et découverte de
l'archipel. Le vent a déserté la zone, inutile de s'empresser de lever l'ancre ! Une navigation au moteur
n'est pas notre tasse de thé. Mieux vaut profiter de cette escale bermudienne en attendant la reprise
des hostilités !
Les escales sont bien entendu une occasion de retrouver nos amis medatlantistes. Le marin à terre aime à partager et à échanger son vécu. Si les Antilles sont déjà à plus de 880 miles, la tradition du ti'punch est un rite que nous savons entretenir. Nous sommes conviés à faire plus ample connaissance avec l'équipage entièrement renouvelé de Bellatrix. Nous arrosons la fin de notre première étape tout en pensant au reste de la flotte qui vogue en direction des Azores. Ils progressent lentement, certainement trop doucement à leur goût par manque de vent. Nous les suivons en plottant leur position sur notre carte marine. Ils feront certainement la même chose lorsqu'arrivés à Horta, ils nous attendront.
Quel accueil ! |
St Georges |
Les escales sont bien entendu une occasion de retrouver nos amis medatlantistes. Le marin à terre aime à partager et à échanger son vécu. Si les Antilles sont déjà à plus de 880 miles, la tradition du ti'punch est un rite que nous savons entretenir. Nous sommes conviés à faire plus ample connaissance avec l'équipage entièrement renouvelé de Bellatrix. Nous arrosons la fin de notre première étape tout en pensant au reste de la flotte qui vogue en direction des Azores. Ils progressent lentement, certainement trop doucement à leur goût par manque de vent. Nous les suivons en plottant leur position sur notre carte marine. Ils feront certainement la même chose lorsqu'arrivés à Horta, ils nous attendront.
Notre
appareillage pour les Açores est prévu à partir du lundi 28 mai mais la météo reste maîtresse en la matière
comme toujours. Le départ peut être avancé ou différé. Inutile de nous hâter si
Eole n'est pas au rendez-vous. Nous aurons à parcourir quelques 1850 nautiques
-3400 kilomètres- avant d'arriver à Horta. Cette étape sera deux fois plus
longue que la précédente. Autant la débuter dans les meilleures conditions
possibles !
(1) guidon : fanion.
(2)
« horses latitudes » : terme utilisé par les Anglais pour
qualifier les calmes habituels sous ces latitudes. Il n'était pas rare que les
voiliers se retrouvent bloqués jusqu'à plusieurs semaines dans les zones abandonnées
des alizés et pas encore exposées aux vents d'ouest. Lorsque les réserves d'eau
douce s'amenuisaient de façon inquiétante, les chevaux, grands consommateurs de
ce liquide précieux, étaient jetés par dessus bord.
(3) chanson de Lynda Lemay.
(4) bosco : maître de
manœuvre dans la marine nationale.
(5) fichiers GRIB : fichiers
météorologiques que nous téléchargeons en mer à partir de notre téléphone
satellite.
(6) VHF : radio “very high frequency” (Très haute fréquence dans la
langue de Molière....)
(7) A chaque étape de
la traversée MEDATLAN aller Hubert,
organisateur de notre rallye avait pour usage d'accueillir les arrivants avec
sa corne de brume personnelle en
cuivre. Hubert et sa corne de brume,
ne participent pas à la traversée retour. Mais la tradition MEDATLAN se perpétue avec une corne de brume plus
classique, une corne en plastique.
(8) pioche : ancre
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